Joe Hisaishi est le compositeur indissociable du réalisateur japonais Hayao Miyazaki, génial créateur de films d’animation comme Mon Voisin Totoro, Nausicaa de la vallée du vent, Princesse Mononoké ou le Voyage de Chihiro… Il est ce soir au piano et à la baguette du Yellow Socks Orchestra. Émerveillement garanti.
Depuis quelques années, je remarque une tendance qui me laissait dubitatif : les ciné-concerts. Ça a l’air de très bien marcher, la popularité des films associée à la présence d’un orchestre symphonique au grand complet remplissent des Zénith partout en France.
Et ce soir au Zénith de Lille, u-play mets les petits plats dans les grands en réunissant sur scène Joe Hisaishi, compositeur des musiques des films du légendaire studio Ghibli, excusez du peu, avec le Yellow Socks Orchstra, le chœur d’adultes de chambre de Rouen, le chœur d’enfants de la maîtrise des Hauts de Seine, les sopranos Alexandra Marcellier et Grace Davidson, ainsi que la mandoliniste Marie Burou.
Ce qui fait 160 personnes sur scène. Croyez-moi, ça en jette.
Le Zénith est rempli à ras bord, le public est hétéroclite, il y a des jeunes, des moins jeunes, des déguisés, des enfants. Et dès l’entrée de l’orchestre sur scène, on sent une ferveur intense, qui passe direct à tonitruante lorsque Joe Hisaishi arrive à son tour. Les tribunes vrombissent.
Et c’est parti pour plus de deux heures dans les univers poétiques de Miyazaki, en commençant chronologiquement avec “Nausicaa de la vallée du vent”, première collaboration entre Hisaishi et Miyazaki. Des tribunes le son est exceptionnel, et la présence des 160 musiciens est pour le moins immersive. On perçoit chaque corps de l’orchestre, même en n’y connaissant rien en musique symphonique, frissons garantis.
Après Nausicaa, on oublie l’ordre chronologique et c’est au tour de Kiki la petite sorcière, et la mélancolie fait mouche. Ce n’est peut être pas sa B.O. la plus connue, ni le film le plus populaire des studio Ghibli, mais l’alchimie des images et de la musique est exceptionnelle.
On change d’ambiance avec “Princesse Mononoke” peut être le plus sombre des films de Miyazaki en apparence, le plus violent en tout cas. Et cela se ressent dans la musique. Les choeurs se font martiaux, les timbales résonnent. Pour le thème de la princesse, la soprano Alexandra Marcellier monte sur scène. C’était un grand moment et il fallait bien cela pour un aussi grand film.
Pour “Le Vent se lève”, C’est au tour de la soliste Marie Burou d’occuper le devant de scène avec sa mandoline, mise à l’honneur sur cette bande originale, là encore superbe. Ce qu’on remarque, c’est à quel point Joe Hisaishi se renouvelle sur chaque film, tout en conservant son style.
On passe ensuite sur “Ponyo sur la falaise” qui est peut-être le Miyazaki que j’aime le moins. Même si je suis toujours mal à l’aise devant le image de la tempête (nan mais l’eau est trop bizarre !), la musique reste de haute volée.
Le public est extrèmement enthousiaste à la fin de chaque film, Joe Hisaishi doit attendre que les applaudissements et tapages de pieds dans les tribunes cessent pour reprendre. Mais après Ponyo, c’est le moment de l’entracte, avec l’immanquable détour par le stand de merchandising Ghibli. Je ne voulais pas y aller, ayant encore en mémoire l’épisode douloureux du spectacle Pat Patrouille au Zénith il y a quelques années. Mais par curiosité, j’y ai fait un tour et ait été agréablement surpris des tarifs pratiqués : 9,90€ pour un mug, fabriqué en France en plus, on a vu bien pire dans le genre. On vous voit le merchandising de la Pat Patrouille, pas la peine de vous cacher.
Le concert reprend, une partie seulement de l’orchestre est revenue, les cordes sont restées en coulisses pour “Le Château dans le Ciel”, qui laisse la part belle aux cuivres. Joe Hisaishi alterne entre le piano et le pupitre de chef d’orchestre, avant de rester au piano pour “Porco Rosso”, plus jazzy. Les cuivres le rejoignent en devant de scène pour l’occasion. Un autre grand moment pour moi, Porco Rosso étant le premier Miyazaki que j’ai découvert sur canal plus il y a une éternité.
Tout le monde revient pour “Le Château Ambulant” et encore une fois on voyage avec sa B.O. en valse. C’est peut-être la plus belle interprétation de l’orchestre ce soir, c’est dynamique, c’est enchanteur.
Joe Hisaishi revient au piano, et avec l’arpège des 12 notes le plus mélancolique du monde, on est replongés dans le chef d’œuvre absolu de Miyazaki : le voyage de Chihiro. La soliste Grace Davidson, entendue sur le “Voices” de Max Richter (une voix pure comme la fin de l’humanité, youtube est votre amie), fait des merveilles, même si ça ne commence qu’avec des “doudoudou”. La douceur et la justesse de sa voix magnifient la reprise de “One Summer’s Day”. Je m’en suis pas remis.
Vient – enfin serait-on tentés de dire – “Mon Voisin Totoro”, la B.O. la plus connue de Hisaishi. Et pendant 10 minutes, on a droit à un final à la hauteur du reste du spectacle : les cordes, les cuivres, les chœurs, Grace Davidson et Alexandra Marcillet, tous s’unissent sur le thème joyeux de Totoro, qui marque la fin du spectacle. Le Zenith, debout, salue la performance de l’Orchestre et de Joe Hisaishi, tout sourire.
Nous aurons même droit à deux rappels, avec Joe Hisaishi au piano, d’où il se lève de temps en temps pour le pupitre. Il y aura un retour sur Porco Rosso avec “Madness”, et le superbe “Ashitaka and San” de Princesse Mononoké.
Alors, le ciné-concert, verdict ? Eh bien ce n’était pas à proprement parler un ciné-concert, où un film est projeté en entier avec la B.O. jouée en live. Ici nous avions des extraits de films qui illustraient la musique jouée, mais l’expérience est magique. S’il restait des places, j’y serais retourné avec mes enfants. Et comme il reste quelque places pour “Les Deux Tours” au même endroit, avec le même orchestre, dans 15 jours, je vais me laisser tenter…
Joe Hisaishi à Lille : la setlist
1 – Nausicaä de la vallée du vent
The Legend of the Wind
Nausicaä Requiem
The Battle between Mehve and Corvette
The Distant Days
The Bird Man
2 – Kiki la petite sorcière
A Town with an Ocean View
Heartbroken Kiki
Mother’s Broom
3 – Princesse Mononoké
The Legend of Ashitaka
The Demon God
Princess Mononoke
4 – Le vent se lève
A Journey (A Dream of Flight)
Nahoko (The Encounter)
A Journey (A Kingdom of Dreams)
5 – Ponyo sur la falaise
Deep Sea Pastures
Mother Sea
Ponyo’s Sisters Lend a Hand – A Song for Mothers and the Sea
Ponyo on the Cliff by the Sea
Entracte
6 – Le château dans el ciel
Doves and the Boy
Carrying You
7 – Porco Rosso
Bygone Days
8 – Le château ambulant
Symphonic Variation “Merry-Go-Round + Cave of Mind
9 – Le voyage de Chihiro
One Summer’s Day
Reprise
10 – Mon voisin Totoro
The Path of the Wind
Hey Let’s Go
My Neighbor Totoro
Rappels
Madness (Porco Rosso)
Ashitaka and San (Princesse Mononoké)