Après avoir vu Mark Knopfler en première partie de Bob Dylan il n’y a pas longtemps, et m’être rendu compte que même si les albums précédents ne m’avaient pas emballés, sur scène le plaisir était toujours le même, je me suis dit que ça serait pas mal de s’offrir un concert de l’ex Dire Straits pour nos 5 ans de mariage. Surtout que son dernier album, Privateering, flirtant avec le blues, est pour moi le meilleur depuis “Shangri-La” en 2005.

J’ai profité d’une offre sur le site officiel de Knopfler pour acheter des places “V.I.P.” : au final ça consiste juste à faire la queue dans une autre file qui a le droit d’entrer 10 minutes avant les autres. Pourquoi pas… et au final on s’en sort très bien: les gens s’amassent devant le pied de micro de Mark, nous laissant le champ libre à gauche de celui ci, ce qui est vachement plus intéressant pour faire des photos. Oui, pas d’accréditation, mais un nouveau compact et c’est parti pour des photos à l’ancienne…

Ruth Moody

Le Liberté est un superbe Zénith, plein à craquer, dans la fosse et les gradins. Le public est très enthousiaste, bien qu’un peu frileux au début de la première partie. Ils ‘agit d’une ravissante jeune femme en robe blanche volante, très country… quand elle prend un banjo, oui, c’est définitivement country… mais quelle voix ! Il s’agit de Ruth Moody, qui a fait les chœurs sur l’album “Privateering”, et Mark lui a rendu la pareille en faisant les chœurs (et la guitare inimitable) sur le très beau “Pockets” de son album solo “These Wilder Things”. Accompagnée de son groupe, avec violon, contrebasse et batterie, elle assure la guitare et le banjo. De jolies ballades country, avec parfois de très beaux moments. Elle se met le public breton dans la poche en racontant qu’elle venait ici quand elle était enfant. Ajouté à des titres où elle fait participer la foule comme le très beau “Life Is Long”, mission accomplie à la fin de son set. Elle est ovationnée comme il se doit et on patiente pour la suite des réjouissances.

Mark Knopfler

Avec une ponctualité toute british, tout comme sa veste d’ailleurs, le manager de Mark Knopfler entre sur scène et présente le groupe avec un enthousiasme digne d’un monsieur Loyal… le groupe entre sur scène, on peut voir les regards des musiciens et même de Mark lorsqu’ils découvrent la salle, encore allumée, pleine à craquer avec un public très dense.

Ils commencent avec le classique “What It Is”, le son n’est pas optimal, mais un ingé son se balade devant les crash barrières avec un ipad et fignole les réglages du bout du doigt. La grande classe. Sur scène, je n’irais pas jusqu’à dire que c’est la grande éclate, c’est Mark Knopfler, on sent qu’ils sont dans la routine. Solo de batterie très court en intro de “Corned Beef City”, un nouveau titre avec une guitare saturée qui rappelle “Money For Nothing”. On sent que le groupe est le fruit de plusieurs influences. Au claviers, il y a l’inébranlable Guy Fletcher, un fidèle de l’époque Dire Straits. A la basse, c’est Glenn “je fais pas la tronche pourquoi ?” Worff, Ian Thomas est à la batterie, et le sympathique Richard Benette est fidèle au poste, en seconde guitares et mandolines.

A ce groupe, viennent s’ajouter Michael McGoldrick aux flûtes et Uileann Pipes et John McCusker au violon et bouzouki: les deux musiciens s’étaient greffés au groupe pour la tournée “Get Lucky” qui avait des résonances irlandaises. Et comme ça fonctionnait très bien avec eux, ils sont restés.
“Cleaning My Gun”, qui sonne comme un single de Mark Knopfler, mais sans le petit côté génial d’un “Boom Like That”. Ca fait son effet tout de même, le son se stabilise, la voix de Mark s’éveille aussi. Sa Gibson Standard ’58 est un plaisir à voir, et à entendre, surtout entre ses mains.

Autre single, avec une petit intro détendue, où Mark montre le rythme à la guitare à Richard avant de lui dire “voilà, comme ça…bon chance !”. Le morceau est excellent en live: Mark Knopfler à l’acoustique, c’est pas courant, et le groupe qui le rejoint soudain sur le refrain, étoffant le son, c’est tout bon. Ils enchaînent sur un solo de Uilleann Pipe, le superbe “Father & Son”, la guitare de Mark s’ajoutant discrètement.  Malgré un petit souci de son – un bourdonnement sur le micro de l’Uileann Pipe – la chair de poule est au rendez-vous. Le morceau continue sans transition sur “Hill Farmer Blues”, très sympa de l’entendre en live, la tournée de l’album ou était le morceau ayant été annulée en 2002 suite à la chute de moto de Mark.

Mark fait de la pub pour sa petite protégée, et invite Ruth Moody à remonter sur scène… lorsque les premières notes du morceau qu’ils vont jouer se font entendre, je souris “I Dug Up A Diamond”: écrit avec Emmylou Harris et chanté avec elle sur la tournée “Roadrunning” en 2006, j’étais curieux d’entendre Ruth Moody là dessus: tout en retenue elle a assuré avec brio. Elle reste sur scène pour “Kingdom Of Gold” du dernier album, un des deux titres où elle fait d’ailleurs les chœurs sur la version studio. A choisir j’aurais préféré l’autre “Seattle”, c’est un peu mou aussi mais la mélodie est plus sympa.

A ce point du concert, je suis conquis : c’est du pur Mark Knopfler dans la soixantaine : très calme, parfois blues, parfois irlandais, pas de Dire Straits. C’est encore aujourd’hui, ce que le public doit pourtant attendre, son travail en solo n’était que très peu médiatisé. Mais le public breton est un public exceptionnel, et fait honneur à la carrière solo de “La Voix et La Guitare de Dire Straits”.

Autre titre de “Privateering” avec le génial “I Used To could”: une guitare syncopée rockabilly, et surtout, le piano de Jim Cox à l’honneur. Je suis admiratif de ce pianiste, qui a un style très rétro, qu’on imagine aisément dans un saloon du far-west. Il brille sur ses interventions sur ce morceau, en semi impro. En comparaison, Marko ne se foule pas à la guitare… mais je pense que ce n’est pas le but, à voir son sourire jusqu’aux oreilles, tourné vers Jim Cox pendant que celui ci débite les notes.

Nouveau changement de guitare, une intro au clavier par Guy Fletcher… et la National, étincelante, qui entre sur scène: les fans de Dire Straits vont être contents: c’est le classique “Romeo & Juliet” que Mark a du jouer des milliers de fois, mais qui est toujours le bienvenu. La flûte et le bouzouki s’intègrent parfaitement.

“Song For Sonny Liston” issu de Shangri La, devient aussi un incontournable et c’est tant mieux. Mark à la Gibson au son bien gras, seul avec Richard Bennett. Le public frappe le rythme des mains, puis Ian Thomas rejoint le mouvement. Autre titre de “Shangri La” avec “Postcards from Paraguay”, ce qui est déjà plus curieux. Sur l’intro Mark présente ses musiciens, chacun ajoutant son instrument sur le rythme de Ian Thomas, et ils enchaînent sur ce morceau qui est, disons le, pas le point fort de “Shangri La”. Mais assez sympa en ligne finalement.

Retour en arrière sur le prochain morceau avec “Marbletown” de 2002, dans une version où une fois de plus, Mark ses musciens à l’honneur, et tout particulièrement l’écossais John McCusker qui nous offre un solo de violon en pizzicato, Mark dans l’ombre au fond. Un très bon moment.
Autre classique de la carrière solo, l’énorme “Speedway To Nazareth” avec le crescendo électrique énorme. Le public est à fond, et ça se ressent sur scène. Mark s’aventure dans des solo plus inspirés, et tous – hormis Glen Worff – ont l’air de s’éclater.

Autre titre de Dire Straits, et s’il ne fallait en garder qu’un, ce serait bien évidemment “Telegraph Road”, 15 minutes de pur bonheur, un solo final comme on les aimes, même si ça sent indéniablement la fin de concert.
Premier rappel avec “Gator Blood” du dernier album, qui rend beaucoup mieux en live que la version studio, Mark Knopfler à la slide, c’est pas mal aussi… même si on est pas encore remis de ce “Telegraph Road”. Un dernier morceau… comme à chaque fois, je prie pour “Brothers In Arms”, et comme à chaque fois, j’ai droit à l’infâme “So Far Away” de Dire Straits. Il alterne les deux suivant les jours, et je me suis payé la seule chanson de Dire Straits que je passe à chaque fois que j’écoute l’album ou un live. Je ne la supporte pas. Mais j’ai eu “Telegraph Road”.

Mark Knopfler est un gars intègre: il suit son chemin, avec une régularité qui peut sembler monotone : un album, une tournée en Europe, une pause, une tournée américaine, un album… Mais ça fonctionne. Il ne cède pas à la facilité de la tournée “best of” en enchaînant les tubes de Dire Straits, ce qu’il pourrait faire en remplissant les zéniths. Avec une simplicité qui lui est propre, il arrive avec ses nouveau titres. Pour peu qu’on adhère à son style, qui évolue au fil des albums, et à sa plume – les textes de Mark sont vraiment superbes – c’est toujours le même plaisir de le voir en concert. Et tout particulièrement ce soir: le public étant ce qu’il est, le groupe s’est amusé aussi sur scène, et nous n’avons pas eu droit à un concert téléguidé, froid: certes, leur spectacle est rôdé, mais ce sont tous des musiciens hors pair, donc c’est parfait.
Vivement le prochain album, et donc la prochaine tournée…

A noter, comme c’est le cas depuis plusieurs années, Mark Knopfler propose via son site officiel la vente de l’enregistrement du concert: mixé, livré un mois après sur une clef usb en métal en forme de guitare, dans un mini flight case, pour 40 €, ça devrait être systématique: j’ai pu revivre le concert en écrivant ces lignes.

Mark Knopfler : la setlist

What It Is
Corned Beef City
Cleaning My Gun
Privateering
Father and Son
Hill Farmer’s Blues
I Dug Up A Diamond
Kingdom of Gold
I Used to Could
Romeo and Juliet
Song for Sonny Liston
Postcards from Paraguay
Marbletown
Speedway at Nazareth
Telegraph Road
Rappels:
Gator Blood
So Far Away

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