Porcupine Tree est un groupe de rock progressif bien à part. Steven Wilson a débuté en 1987, faisant des démos tout en participant à 40 autres projets en même temps, et le groupe a vraiment démarré en 1993 avec l’arrivée de Richard Barbieri aux claviers, Colin Edwin à la basse et Chris Maitland à la batterie. Au départ, leur musique était dans la lignée du Pink Floyd des années 70, époque Meddle. Très atmosphérique, psychédélique. Peu à peu, emmené par la passion de la production qui anime Steven Wilson, le groupe traverse plusieurs genres, touchant à l’électronique, un rock plus simple, quelques expériences pop, deux albums très métal jusqu’au petit dernier “Fear Of a Blank Planet”, qui, même si la dominante reste largement métal, fait un peu la fusion de ce qu’ils ont fait ces 15 dernières années.

Comme je l’ai déjà dit, le groupe est emmené par Steven Wilson, qui contrairement à nombre de musiciens, ne préfère pas la scène au studio, lui son truc, c’est la production. Et dans ce domaine, il est adulé. Des groupes et des artistes aussi variés que Anja Garbarek, Marillion, Anathema, Opeth, Yoko Ono, Fish et même notre Ange national sur l’album Culinaire Lingus ont fait appel à ses talents !
Mais ce n’est pas tout. Steven Wilson fait aussi partie des groupes no-man (plus mainstream que Porcupine Tree) Bass Communion (très expérimental), Blackfield (rock pop en duo avec Aviv Geffen), IEM, Headphone Dust…
La question que tout le monde se pose : quand dort-il ?
Steve Wilson assure donc la guitare, quelques claviers et le chant.
Porcupine Tree ne serait pas ce qu’il est sans le clavieriste Richard Barbieri, ancien membre du groupe Japan, qui apporte un son tout à fait unique au groupe avec ses claviers finement mis en avant (même derrière deux guitares sur-saturées…).
Colin Edwin assure la basse, épaulé par Gavin Harrisson à la batterie, deux pointures, aucun défaut et quelle virtuosité…
La cinquième branche de l’arbre est le second guitariste John Wesley, qui épaule le groupe en concert depuis leur tournant “métal”.

Mais attention, quand je dis “métal”, je ne parle pas d’un groupe de braillards qui saute partout avec les guitares qui produisent directement du 220 volts sonore.
Non.
Ici, certes les guitares sont saturées de distorsion, mais avec panache… et Steven Wilson n’a rien d’un braillard, bien au contraire, ses prouesses vocales et son physique auraient pu faire de lui une star de la pop s’il n’avait choisi une voie aussi peu médiatique que le progressif…

Splendid de Lille, 17h : personne. Je patiente devant les portes, les gens arrivent vers 18h30. Beaucoup de jeunes mais aussi des plus âgés, beaucoup de “chevelus”, des t-shirts “Pink Floyd”… Porcupine Tree attire des gens d’horizons différents.
Vers 19h, Steven Wilson passe devant moi derrière les portes, rejoint par… Christian Décamps, PDG d’Ange. Les deux amis parlent tranquillement (peut être de projets communs ?) en prenant une bière au bar, pendant qu’on s’impatiente.
Quand les portes s’ouvrent enfin, je prend possession de mon pass photo, qui ne sont autorisées que pendant les 3 premiers morceaux. C’est dommage, les meilleures photos ne se font pas au début, mais c’est mieux que rien.
Leslie ayant reussi à garder une place juste devant les barrières, on est très bien placés, un peu à gauche de la scène.
La salle se remplit très vite, je me met sur le côté pour pouvoir me mettre dans le (petit) espace réservé aux photographes.
Le brouillard commence à envahir la salle, et la première partie entre sur scène. Il s’agit de “Pure Reason Revolution”. Je ne pourrais pas dire grand chose sur ce groupe qui m’a pas mal ennuyé. Leur musique est un rock métal avec beaucoup de claviers pour faire style electro/années 80/métal. Le gros problème était le son, très fort, très gras, on n’entendait pas le chant. Pas terrible en ce qui me concerne. Je patiente.
Il terminent rapidement, pas beaucoup de communication avec le public, un “thank you” peut être. Ils laissent la salle dans une brume digne d’un hammam. La chaleur en est proche aussi, comme souvent au Splendid. Plusieurs personnes sont tombées comme des mouches dans le public, la sécurité en a évacué 4 dans les premiers rang en quelques minutes. Les bouteilles de cristalline ont vite circulé.

Je me replace sur le côté en attendant l’entrée de Porcupine Tree. Quand les lumières s’éteignent, je me précipite devant la scène, les photographes sont nombreux, et les places sont chères.
L’écran derrière la scène diffuse des images du clip de Fear of a Blank Planet, Richard Barbieri prend place aux claviers, suivi par les autres musiciens.
Et ca commence très fort avec le titre du dernier album “Fear Of A Blank Planet”. Etonnamment, les guitares rugissent, le son est toujours aussi fort, mais on entend parfaitement bien par rapport à la première partie. Tant mieux.
Je ne profite pas vraiment des trois premiers titres, étant donné que je mitraille un maximum pour pouvoir sélectionner les meilleurs clichés.
Steven Wilson n’a pas la dégaine d’un métalleux, loin s’en faut. Cheveux blonds cendrés longs jusqu’aux épaules, petites lunettes à monture métallique discrète, chemise noire, jeans et pieds nus…et il boit de l’eau. Par contre il secoue la tête, difficile de voir son visage cachés derrière un rideau de cheveux.
Il joue sur une PRS de toute beauté, couleur vert turquoise foncé, avec le fameux manche incrusté d’oiseaux. Le son qu’elle délivre est clair, précis, et il est plus que bien épaulé par John Wesley sur une Gibson. Les deux guitaristes assurent tour à tour la rythmique ou le solo, on n’est pas dans un schéma “je suis le leader et vous m’accompagnez”.

C’est là la force d’un groupe de progressif (même si Steven Wilson refuse cette étiquette maintenant) : chaque membre est aussi important, et surtout dans le cas de Porcupine Tree, tous sont virtuoses.
Après quelques mots en français issus de ses cours au collège (“Bonsoir…Il fait chaude !”), Steven Wilson prend une guitare acoustique et ils jouent “Lighbulb Sun” de l’album éponyme. Plus calme, mais non moins énergique. Les passages doux précèdent d’autres beaucoup plus rock, là encore rien à redire, ils assurent.
Steven Wilson laisse sa guitare et se met à un clavier, ils vont jouer “My Ashes”, le titre le plus doux du dernier album. La scène s’assombrit, Steven chante a merveille, ce titre étant un superbe exemple de ce qu’il sait faire sur la version CD… sauf qu’ici, c’est John Wesley qui assure la plus grande partie des chants, et il n’a rien à envier à Steven Wilson de ce côté, tout deux ont de superbes voix claires et évocatrices. Magnifique en live.

Après avoir repris place devant la scène mais derrière les barrières cette fois, je range l’appareil photo et je redécouvre la scène d’un point de vue plus normal. Pas étonnant que je n’ai pas vu Gavin Harrisson derrière sa batterie, il est barricadé derrière ses fûts et pourrait tenir un assaut.
Le morceau suivant est sans doute l’un des grands moments du concert : le fameux “Anesthetize” de 17 minutes, avec son intro rythmée par le duo basse-batterie, un passage très métal avec les deux guitares qui prennent aux tripes, les effets d’échos nous hypnotisent, Barbieri gère tout ça discrètement mais efficacement.
Le refrain, entraînant, est repris par le public, Steven Wilson se lâche. Et il troque sa PRS pour une Gibson Gold Top du plus bel effet pour le final en douceur de ce morceau magistral. Les applaudissements sont à la hauteur de la prestation.

On reste dans le registre heavy-metal avec le riff d’introduction de “Open Car”. Les chevelus qui n’avaient pas encore écouté le dernier album se réveillent et font les dindons de la tête, certains de façon assez ridicule… Steven Wilson, toujours en grande forme, est en osmose avec le public sur le refrain. Très vivant ce concert.
On se calme un peu avec “Gravity Eyeslids”, morceau que j’affectionne moyennement. La version live est bien, sans plus. Steven Wilson mime les paroles avec la main, il est possédé par leur musique.
Il reprend le micro pour nous annoncer qu’il vont jouer une chanson issue d’une face B (en l’occurence de la version 2CD de “In Absentia”) : “Drown With Me”. Morceau un peu plus “simple” que les précédents, mais à la mélodie efficace.
Ils ne tardent pas à revenir dans un registre plus métal avec “Blackest Eyes”, que le public connait par coeur, la encore, ça ce secoue la tête en fermant les yeux dans le public, sur scène ca bouge pas mal aussi, ils s’en donnent à coeur joie.
Lorsque Richard Barbieri lance l’ambiance du morceau suivant je frémis… je crois reconnaître mon morceau favori du groupe, “A Smart Kid” issu de l’album “Stupid Dream” en 1999… je ne pensait pas qu’ils joueraient ça mais… si !
C’est superbe, à la hauteur de la version studio, le chant de Steven Wilson est superbe, tant au niveau justesse que du phrasé (“There was a war but I must have won”), le pont dramatique est superbe également, Richard Barbieri domine largement ce morceau, rien que pour celui là je ne regrette pas d’être venu… et comme le reste n’est pas mal non plus, le bilan s’annonce des plus satisfaisants.
Sauf que Steven Wilson juge que ce n’est pas assez, et seconde surprise : “Sever” de l’album Signify de 1996 ! Le morceau le plus rock de cet album, qui a gagné en nervosité avec l’âge. La version qu’ils jouent est dopée, puissante, toujours en gardant cette justesse du chant, ce qui fait la beauté de leur musique. Encore un grand moment.

Petite pause pour nous annoncer qu’ils vont jouer les deux derniers titres de “Fear Of a Blank Planet” : “Way Out Of Here” et “Sleep Together”. L’occasion de parler des paroles chez Porcupine Tree. Elles ne sont pas vraiment joyeuses, le thème du dernier album étant l’avènement d’une nouvelle jeunesse nourrie au net, à l’ipod, la xbox, la pornographie et les médicaments puissants. Le thème de l’adolescence, ses rejets, sa rebellion sont là, sombres, ambigus. Les projections pendant “Way Out Of Here” montre une jeune fille style gothique qui marche a côté de voix de chemin de fer, qui détruit son univers jusqu’à prendre une petite pillule. Joyeux n’est-ce pas ? Une manière pour Porcupine Tree de toucher un nouveau public ou thème comme un autre ?
“Way out Of Here”, fignolée en studio avec l’aide de Robert Fripp le Grand, marche encore mieux en live. Le refrain, qui a tendance à un peu trop couper le rythme du morceau sur la version album, passe ici très bien, chanté par John Wesley. Les ambiances électroniques de Richard Barbieri sont nickel.

Par contre sur “Sleep Together”, moment d’anthologie sur la version album avec un solo de clavier qui rapelle “Kashmir”, ne rend pas aussi bien en live de ce côté, mais il vaut le coup d’oeil pour la prestation phénoménale de Gavin Harrisson à la batterie. Les claviers ne s’entendaient pas assez bien de la ou j’étais, mais après tout, le premier rang ne peut pas avoir que des avantages.

Et c’est la fin,et sur quel final ! Ils repartent en coulisses, un technicien débarasse le clavier de Steven Wilson, et ils finissent par revenir sur scène pour le désormais classique “Even less”. Même s’il s’agit de la version courte, elle est terriblement efficace, là encore le public chante avec Steven Wilson. On croise les doigts pour que ce ne soit pas le seul rappel… et ils enchaînement avec “Mother & Child Divided”, instrumental très heavy metal, avec un gros riff bien comme il faut, et ils concluent cette soirée avec “Halo”, dans le même style, ce qui en fin de compte fait pas mal de titres de “Deadwing”, leur précédent album.
Ils quittent la scène en remerciant le public, et vice versa.

Le métal ca peut être bien. Il suffit pour cela de prendre un groupe aussi talentueux que Porcupine Tree, avec un chanteur aussi doué que Steven Wilson, et on passe un très bon moment. La puissance de leur musique est phénoménale, et pas seulement artistiquement: prévoyez des bouchons filtrants si vous allez les voir : avec les miens je trouvais toujours le son très fort. Faites gaffes à vos cellules cillées, ce sont les seules cellules du corps qui ne se renouvellent pas, une fois perdues, vous perdrez de l’audition !
Un groupe vivement recommandé, aussi bien aux progreux qu’aux métalleux, leurs univers se croisant sur scène.

Merci beaucoup à Jérôme chez RoadRunnerRecords France, Amélie et la sécurité au Splendid qui m’ont permis de faire les photos.

Porcupine Tree : la setlist

Fear of a Blank Planet
Lightbulb Sun
My Ashes
Anesthetize
Open Car
Gravity Eyelids
Drown With Me
Sentimental
Blackest Eyes
A Smart Kid
Sever
Way Out of Here
Sleep Together

Rappels:
Even Less
Mother and Child Divided
Halo

1 commentaire
  1. J’ai assisté au concert …
    C’était magique, les artistes ont joué avec brio, bref mon groupe préféré en concert ne m’a pas déplu, loin de là !

    Bonne critique.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Articles en rapport